Voici une liste de trucs qui vous feront peut-être sortir de votre zone de confort en tant que MJ, mais qui devraient vous permettre de tenter des choses inédites. Pas de blabla, je vous balance tout ça, vous vous débrouillez avec.

1 – Commencer une aventure “in medias res”… et laissez les joueur improviser votre scénario.

Comme indiqué dans l’article Pourquoi êtes-vous là?, il est très amusant de commencer une aventure non pas à l’auberge (celle dont les lapins essaient de vous faire sortir depuis un bout de temps déjà), mais en pleine action.

Mais attention ! Pour beaucoup de MJ, commencer “in medias res” signifie faire jouer une scène d’action spectaculaire, semblable aux préambules des films de James Bond… C’est possible, bien évidemment, mais il y a tellement d’autres façons de procéder ! Le principe consiste à décrire une situation déjà compliquée, où les personnages sont déjà impliqués, puis à les amener à vous décrire comment ils en sont arrivés là. L’astuce, c’est qu’ils vont bien évidemment écrire votre scénario à votre place (idéal pour les soirées où vous avez du mal à démarrer une impro).

“Vous êtes dans une geôle, enchaînés au mur… à part toi, (s’adresser à un joueur) : tu es le seul en liberté, et tu les regardes au travers des barreaux en bavardant avec le duc. Au fait, que s’est-il passé ? Qu’ont fait tes camarades ?”

“Le temple de Barat Euth Mord’opp, crépuscule du solstice d’hiver. Tous déguisés en adorateurs de Mord’opp, vous assistez à la cérémonie de l’Eveil du Grand Crapaud. Soudain, le grand prêtre vous désigne spécifiquement parmi la foule des ‘fidèles’. Comment êtes-vous arrivés là ? Que venez-vous chercher dans un lieu de culte malfaisant ? Et pourquoi connais-tu (adressez-vous à un joueur spécifique) les psaumes du Grand Crapaud par coeur ?”

“L’armée des dévoreurs de chant assiège désormais la petite ville. Il est impossible de reculer désormais, ce sera bientôt l’affrontement, et vous savez qu’il est perdu d’avance. Que diable faites-vous dans la ville des Musiciens, et comment allez-vous vous en sortir ?”

2 – Faire jouer aux joueurs les adversaires de leurs personnages habituels.

Si vos personnages ont l’habitude de se frotter au même groupe d’adversaires, qu’ils affrontent régulièrement, pourquoi ne pas les mettre dans la peau de ceux qu’ils détestent tant ? (ou qu’ils admirent en secret…)

Faites-leur vivre une aventure inédite, ou un scénario qui explique un élément de la campagne que jouent leurs personnages habituels. Laissez-les se mettre eux-mêmes des bâtons dans les roues !

3 – Faire créer les méchants par les joueurs.

Méthode savoureuse découverte sur un groupe dédié à D&D : faites créer à vos joueurs des personnages de niveau plus élevé que ce à quoi ils sont habitués. Donnez-leur plus de points à répartir que d’ordinaire, et laissez-les par exemple choisir des objets rares, des compagnons animaux dangereux, des pouvoirs inédits. Surtout, si certains veulent créer des grosbills, laissez-les faire, y compris s’ils veulent tricher un peu avec les règles.

Au terme de cette création, annoncez-leur qu’ils viennent de créer non pas leurs PJ, mais les PNJ qu’ils affronteront (c’est un peu vache, mais très amusant si vos joueurs sont enthousiastes et ouverts, ce qui devrait toujours être le cas).

4 – Commencer une aventure par un “previously, in…”

Variante de l’intro “in medias res” : commencez par la fin d’un scénario que les personnages n’ont pas joué (c’est important : cela vous permettra d’avoir un peu de marge de manoeuvre). Pour une fois, vous allez jouer les conséquences du scénario. J’explique l’intérêt de la manoeuvre.

Supposons que le scénario standard soit : “Vous devez vous infiltrer dans la tour de Pjornrachzark le Difficilement Prononçable pour voler le Coeur de Valrkrasnorg.”

Il devient : “Vous vous êtes infiltré dans la tour de Pjornrachzark, vous avez triomphé du magicien, et vous avez entre vos mains le Coeur de Valrkrasnorg.”

Au lieu d’affronter des hordes de défenseurs magiques, les PJ vont devoir sortir du château, par exemple, en se confrontant aux rescapés des hordes qu’ils ont décimées précédemment. Et si le Coeur de Valrkrasnorg commençait à leur parler ? Et s’il était très difficile d’écouler le trésor du magicien, parce qu’on l’estime maudit, et que désormais, les PJ étaient la cible des Chasseurs de Malédiction de la région ? Et si…

N’oubliez pas de distribuer généreusement des plaies et des blessures : les PJ commencent la partie en piteux état.

5 – Jouer un huis clos angoissant.

Si vous n’avez jamais joué de scénario en huis clos, essayez une fois dans votre vie. Le principe est simple :

  • Ca se passe dans un lieu clos (prison, manoir assiégé, île…) : l’essentiel, c’est que la seule façon d’en sortir nécessite un effort (s’évader, traverser les lignes ennemies, trouver un bateau) et que vous ayez prévu au moins deux ou trois péripéties qui viendront compliquer la tâche aux PJ quand ils croiront avoir réuni les conditions nécessaires pour “sortir” (un de leurs compagnons d’évasion est un agent double, ils apprennent qu’un de leurs proches mourant est dans le manoir et que les troupes ennemies l’achèveront dès qu’elles entreront, une terrible tempête se lève et c’est à peine si on distingue les récifs désormais).
  • Ce lieu contient une “énigme” à résoudre : une enquête, quelqu’un à tuer, quelque chose à retrouver…
  • L’endroit contient des choses à découvrir : le plaisir du huis clos, c’est l’exploration. Celle du décor (il y a une salle secrète, un souterrain inconnu, une grotte au trésor) et celle des personnages : un des PNJ n’est pas celui pour qui il se fait passer ou a attiré les PJ ici pour une raison bien différente de celle qu’il leur a donnée de prime abord (c’est le syndrome du Comte Zaroff, aussi baptisé maladie du Dr Moreau).
  • Le temps est limité : la situation empire régulièrement (un virus contamine peu à peu tout le monde, une terrible tempête se lève et va bloquer l’endroit pendant des mois, ou pire, si vous voulez jouer sur un temps très court : le décor est en proie aux flammes ou peu à peu englouti).

6 – Jouer le chrono.

Jouer en temps limité peut se révéler très amusant, et introduire une tension inédite dans vos parties. Prévoyez un scénario en plusieurs “tranches” : chaque fois qu’une tranche est écoulée, quelque chose de désagréable se produit. Vous jouez un scénario où un bateau sombre ? Au terme de la tranche 1, l’eau aura envahi les niveaux inférieurs, et au terme de la tranche 2 ou 3, le navire sombrera entièrement et provoquera un tourbillon mortel.

Munissez-vous d’un réveil ou d’un minuteur, et jouez réellement avec le temps : au bout d’une heure, le minuteur sonne, il se passe quelque chose de grave. Annoncez-le à vos joueurs.

“Ah. On dirait que les zombies ont réussi à percer une brèche dans votre muraille de protection… La situation va radicalement changer dans le camp. Les sentinelles essaient déjà de se réfugier dans la base. Vous n’avez pas pensé à barricader les portes, il me semble, si ?”

Reprogrammez votre chrono tranquillement pendant que les joueurs vous regardent bouche bée (prenez votre temps, savourez…). L’idéal consiste à ne PAS expliquer aux joueurs que vous allez utiliser un chrono en début de partie. La première fois qu’ils entendront le signal sonore, ce sera le choc. Et ensuite, ils vont tenter d’agir TRES vite, parce qu’ils vous verront remettre le chrono en route.

Vous pouvez bien sûr varier, en expliquant par exemple que chaque fois que le chrono sonne, un étage de la tour infernale prend feu et devient un piège mortel… et ensuite réduire les tranches en les faisant passer d’une heure à une demi-heure, puis à dix minutes. Car vous êtes un enfoiré (si si, ne soyez pas timide).

7 – Adapter une campagne d’un autre jeu ou une histoire issue d’un autre genre.

Méthode surprenante mais amusante : prenez les Masques de Nyarlathotep et faites-en une adaptation pour Donj’ (y en a qui l’ont fait, et ça fonctionne très bien). Prenez le scénar du film Star Wars et transformez-le en scénario épique pour L5A. Jouez des PJ inspirés d’Arthur et des chevaliers de la table ronde… mais dans Unknown Armies. Prenez l’histoire que vous connaissez le mieux au monde et transposez-la dans un univers improbable. Le simple exercice d’adaptation devrait déjà se révéler amusant.

8 – Jouer au jeu de l’espion… mais en aveugle.

Tous les MJ le font un jour ou l’autre : on confie à un joueur le rôle de “l’espion” au sein du groupe. C’est lui qui va éliminer discrètement les témoins importants (“Oh, désolé, j’ai tué ce type alors qu’on aurait mieux fait de le faire parler…”), se retourner contre les autres ou les poignarder tranquillement dans le dos.

C’est toujours très sympa, mais cela dénature un peu le rôle du MJ, qui a parfois tendance à “jouer un camp contre l’autre” ou à ne pas être entièrement impartial (ce qui n’est pas forcément un mal, parfois, cela dit).

Utilisez la méthode de l’espion “en aveugle”. Vous écrivez sur un petit papier quelque chose du genre : “Tu es en réalité l’espion.ne du roi Grütcblu et quand les autres retrouveront la princesse, tu as pour mission de l’assassiner. Ca lui apprendra à vouloir sans arrêt des poneys pour son anniversaire et à se faire capturer par le premier duc renégat venu.” Vous prenez ensuite autant de petits papiers qu’il y a de joueurs moins un, et vous distribuez tout ça en cachette. Désormais, votre scénario contient une variable que vous ne maîtrisez pas : un de vos joueurs joue différemment, mais VOUS ne savez pas lequel. Vous devriez bien vous amuser. Vous pouvez même corser un peu le jeu en attribuant PLUSIEURS rôles secrets

9 – Refuser de mettre des images dans vos posts parce que vous avez la flemme.

Une méthode rarement utilisée, et souvent critiquée, mais uniquement par des trous de balle. Elle vous permettra de vous consacrer à des tâches importante comme manger des gâteaux ou jouer à Zelda sur la Switch. Ne la négligez pas, surtout qu’elle ne manquera pas de surprendre les gens, et que les plus intelligents s’esbaudiront devant votre formidable sens de la gestion du temps.

Et voilà, à très bientôt (dans environ huit ans) pour un autre article de la série machin, je sais pus le titre.