On ne nous arrête plus, on a encore (mon épouse et moi) regardé des films qui foutent les miquettes (movies that foute the micouettes en anglais). Et le double feature de ce week-end était un doublé gagnant.
En première partie de programme, Morse, alias Låt den rätte komma in (Let the right one in en angliche), un film adoubé sur son affiche par Guillermo del Toro. D’ailleurs, cadeau, une superbe conversation entre del Toro et l’excellent Mike Flanagan (Haunting of Hill house et The Haunting of Bly Manor, et plus récemment La Chute de la maison Usher, mais aussi le malheureusement très oublié mais excellent Doctor Sleep !).
Bon, maintenant que c’est fait, retour à Morse, un film furieusement poétique, qui prouve que rythme lent ne rime pas forcément avec “mais qu’est-ce qu’on se fait chier !” (comme souvent dans un certain cinéma qui n’a pas l’heur de me plaire : chacun ses goûts… mais pour moi, une intrigue se doit d’avancer à chaque plan, même si c’est pour se casser la gueule).
L’histoire : le petit Oskar, qui se fait bousculer au collège par un groupe de mômes de sa classe, assiste à l’emménagement d’une curieuse “famille” dans l’appartement voisin de celui de sa mère : un homme d’âge mûr et une petite fille de son âge. La fillette est en réalité une créature de la nuit…
Si tu veux résumer le synopsis de Morse, ça tient en une ligne, vraiment. Il se passe deux ou trois trucs. Mais tous sont liés par l’image, le thème, les dialogues et une interprétation d’une élégance et d’une subtilité rares. C’est plein d’émotions, c’est aussi une histoire d’amitié et d’amour, c’est plusieurs histoires d’amitié et d’amour, c’est aussi viscéral qu’élémentaire, et pourtant l’argument fantastique n’y est pas qu’un prétexte (comme parfois dans un cinéma un peu trop affecté et cérébral) : ici, le récit embrasse pleinement son thème surnaturel, introduit d’emblée par un petit saut curieusement léger lors de la présentation d’Eli, la gamine du film.
Bref, on a beaucoup aimé, et je crains de tenter la version américanisée et séritélévisée de la chose : Morse prend exactement l’espace et le temps nécessaire pour raconter son histoire, et laisse surtout en suspens un bon nombre de questions. C’est aussi ça qui lui donne cette qualité poignante, et je n’ai pas trop envie de rallonger la sauce… on verra bien !
Rebaptisé en français “La main” (ce qui n’est pas déconnant, mais qui euh… ben je sais pas mais vu le visuel de l’affiche, est-ce que c’est pas un poil redondant ? Enfin bref…), ce film a été une ENORME bonne surprise.
Ici, à la maison, on aime un vaste panel de flimes de trouille. Ca va de la folk horror (qu’on explore depuis peu) aux slashers abrutis en passant par toutes les blumhouseries pleine de démons et autres créatures d’un autre monde qui font rien qu’à faire chier la famille américaine de base, et aussi par les films de monstres (mes préférés, gloumoutes et grorequins forever !). ici, on a un film balisé, étiqueté, un truc classique de chez classique : le film d’ados qui déconnent et ça leur retombe sur la gueule. Je me rappelle vaguement du dernier machin du genre qu’on avait vu, Truth or dare, qui penchait davantage du côté dégueu/massacre d’ado (un thème qu’on croit réalisé pour les ados en question, mais je soupçonne les auteurs de ce genre de truc de viser aussi le public des adultes dont la progéniture vient de passer le cap des 16 ans, auquel cas ce sont en réalité des revenge movies…) que de l’introspection vraiment horrifique.
Le flime d’horreur, c’est toujours un prétexte pour parler d’autres trucs. Parfois avec de gros sabots. Parfois avec des sabots taille Titanic, quand ça tire vers le pamphlet progressiste un peu trop appuyé et pas vraiment finaud. Et parfois, un film arrive sur de petits chaussons de ballerine, genre pointe, pas-de-bourrée, et il vous assène un bon vieux drop-kick des familles en fin de bobine.
J’ai une petite préférence pour ce genre-là.
Et justement, Talk to me est de ceux-là. Ses ados sont élégamment présentés, et ce sont des ados. Ils ne sont pas plus futés ni plus idiots que les autres, ce ne sont pas des sacs d’hormones ambulants (le cliché devient un tout petit peu chiant, à force) mais ils ont quand même des envies qui commencent à bousculer leur sens moral (et leurs relations entre eux, pas seulement vis à vis des adultes), ils ont une vie, une vie intense qui passe par le grand laboratoire social des teufs entre ados et que filtre l’objectif des réseaux sociaux. Tous ces éléments, on les retrouve dans des tas d’autres films, en particulier l’aspect “ils passent leur temps sur leur téléphone”, mais il faut bien avouer que dans 99% des cas, c’est de la caricature à peine voilée.
Les ados de Talk to me m’ont paru parfaitement vraisemblables, crédibles parce qu’ils sont tous extrêmement bien esquissés dès le début du récit. Ca passe par des choses très grosses, des sabots king size, certes, MAIS pour amener un vrai questionnement sur les désirs et les pulsions, sur le remords, sur le fossé intergénérationnel, et sur la vie en général. Difficile de ne pas s’attacher immédiatement à Riley et à sa soeur, à Mia, et à leurs potes complètement inconscients. Le premier moment fort du film, on le connaît tous, c’est ce moment où on cède à l’injonction du groupe, où on veut “faire partie de”. C’est très bien amené, ça joue sur des effets vraiment délicats, et ça fonctionne à fond. Après une première scène qui donne le ton et qui intrigue, c’est ce microcosme des relations sociales que montre le film, de manière exceptionnellement réussie. Le casting est particulièrement juste, et tous les personnages sont plus profonds, plus réalistes qu’on pourrait le croire.
L’argument fantastique, lui, est tout juste expliqué, de manière un peu oblique qui plus est. La fameuse “main” a des pouvoirs, voilà, point barre. Ces pouvoirs obéissent à des règles précises, un des thèmes qu’on retrouve dans beaucoup de chouettes films d’horreur, de la Main du diable (évidemment) aux Gremlins. Et bien sûr, quand on met des règlements et des ados dans la même pièce, eh ben…
Bref, gros gros coup de coeur pour ce qui pourrait être un “petit film” mais qui se révèle terrifiant jusqu’aux dernières images, avec un déroulement inattendu, une montée de tension parfaitement réglée et une réalisation impeccable. Pour moi, c’est un des films de 2023 à voir absolument si vous aimez le genre, et surtout si vous voulez voir ce qu’on peut faire en réalisant très sérieusement une histoire un peu WTF. Ce sera mon premier coup de coeur de cette année 2024, que je vous souhaite excellente !
Alors… Voyons, voyons… « Parle à ma main » ou « I am the Walrus » 🤓 j’hésitationne 😉
Merci pour ces aperçus sehr interessant 👌, je crois que je vais prendre les deux, entrée 🚪 et dessert 🍮🤓👌😉
Ouh, I am the Walrus, voilà qui me donne envie de réécouter les Scarabeys ! 😀